Quelques exemples valent parfois mieux qu’un long discours…
Ecrivain biographe de métier et par passion, je vous donne ici quelques clés pour nourrir votre autobiographie ou votre récit de voyage afin d’en faire un objet littéraire différent.
Pour cela rien de tel qu’un exemple…
Partons de ma propre histoire afin de respecter la confidentialité des narrateurs et narratrices qui m’ont raconté la leur.

Voici une petite scène de vie, quelque chose qui m’est arrivé. Je vous en livre un premier niveau de récit, comme je le raconterais à une amie :

1) Texte 1 – Simple – celui qui pourrait m’être raconté

“Il y a quelques années de cela, j’étais en vacances avec mon amie Anne dans les îles grecques. Nous avions débarqué à Folégrandos, une île des Cyclades très belle mais assez sauvage et rocheuse…”

>>>>> Il existe une suite à cette anecdote, bien sûr, que je vous révélerai à la toute fin de la page, mais à ce stade, il s’agit de montrer comment enrichir le récit à partir de… ces 2 phrases !

Comment romancer sa propre histoire - Blog Ecriture - Marie Pouliquen

2) Texte 2 – Le même texte, plus nourri, à la 1ère personne du singulier

>>>> Voici ce même souvenir, raconté avec :

  • plus de détails sur mon amie
  • une petite description
  • un peu d’humour et de contextualisation
  • aucun élément fictif ajouté 

“Il y a quelques années de cela, nous sommes parties en vacances avec mon amie Anne dans les îles grecques. Aventureuse et débrouillarde, cette amie bretonne que je connaissais de longue date m’apparaissait comme la parfaite compagne de voyage.
Chaussures de rando maintes fois éprouvées, forme olympique, son sac à dos s’avérait en prime parfaitement optimisé, et dix fois moins lourd que le mien, rempli à la va-vite la veille du départ.
C’est donc le cœur léger et le bagage un peu moins que nous avons embarqué un beau matin sur un ferry depuis le port du Pirée. Nous avions une vague idée des différentes escales à venir et en mains, un guide du Routard à peine périmé de quelques années.
Après la visite de deux ou trois îles enchanteresses, nous avions déjà l’esprit et les yeux émerveillés à la vision des maisons blanches aux toits bleus, des poulpes fraîchement pêchés séchant sur des cordes à linge et des collines plantées d’oliviers, lorsque nous sommes arrivées à Folégrandos : une petite île des Cyclades, sauvage et rocheuse…”

Biographe Paris - Marie Pöuliquen - Blog : romancer son histoire de vie

Texte 3 – Le même texte, romancé cette fois, à la 1ère personne du singulier. Sur le thème de la rupture amoureuse et avec l’introduction d’un court dialogue.

>>>> Voici le même souvenir, mais cette fois enrichi d’un élément fictif : ici, le personnage principal, mon “moi” fictif, vient de vivre une rupture, et cela donne une autre couleur au texte.
Je reprends le même souvenir et le même texte. J’y ajoute de vraies sensations de rupture, déjà éprouvées – hélas … – à d’autres occasions.

Le cœur en miettes, les larmes affleurant chaque matin et chaque soir dans le métro, je ne savais plus comment panser mes plaies encore à vif. J’étais hantée par Sandro et par des souvenirs qui, au lieu de se ternir – cela m’aurait bien arrangée – semblaient constamment ravivés par la traversée d’un quartier dans lequel nous avions nos habitudes, l’écoute d’une chanson qui passait à la radio ou le seul son d’une voix grave qui me rappelait la sienne.

Le moyen de m’en défaire ? Attendre, bien sûr, que la douleur s’estompe. Hélas, je ne suis pas de nature patiente et une deuxième option plus immédiate m’est apparue assez vite : je devais changer d’air.

– Et si on partait dix jours dans les îles grecques, toutes les deux, là, au printemps ?
– Hein ? Quoi ? Bonjour, déjà !

A 8h du matin, Anne ne s’attendait pas à un coup de fil de ma part, encore moins à cette proposition de dernier moment.
– Ecoute, j’ai eu un flash, je te le demande en tant qu’amie, Annouchka, il faut que je parte, je deviens folle. Il faut que je parte… mais pas toute seule ! Tu veux bien t’envoler avec moi dans les Cyclades pour les vacances de Pâques ? On prend nos billets d’avion, on choisit des îles et on s’évade ! »

Anne vivait seule à cette époque et travaillait dans l’Education nationale. Elle n’avait pas prévu grand-chose pour ses vacances, rien qui ne s’annule en tout cas, et je savais bien qu’elle me dirait oui. Aventureuse et débrouillarde, mon amie bretonne m’apparaissait comme la parfaite compagne de voyage pour entreprendre ce périple. Chaussures de rando maintes fois éprouvées, forme olympique, son sac à dos s’avérait en prime parfaitement optimisé, et dix fois moins lourd que le mien rempli à la va-vite la veille du départ.
C’est donc le cœur et le bagage encore trop lourds, mais pleine d’espoir que j’ai embarqué avec elle un beau matin sur un ferry depuis le port du Pirée. Nous avions pour seul programme une vague idée des différentes escales à venir et un guide du Routard périmé depuis quelques années.

Après la visite de deux ou trois îles enchanteresses, Siros, Sifnos, Milos…  Nous avions déjà la tête et les yeux émerveillés par tout ce que nous venions de vivre. Nous étions ivres d’Ouzo, de ruelles aux maisons blanches et aux toits bleus, de poulpes séchant sur des cordes à linge, au-dessus de matous prenant des poses pour les quelques touristes de saison.
Mais pour ma part, ce que j’appréciais le plus dans la contemplation de ces paysages idylliques, c’était l’absence de Sandro. Les quelques évocations de lui qui me traversaient à la nuit tombée disparaissaient comme par enchantement le lendemain matin, car nous nous levions suffisamment tôt pour admirer les levers de soleil sur cette mer bleue intense.
Je me sentais donc déjà presque guérie de lui lorsque nous avons débarqué sur Folégrandos, une petite île des Cyclades sauvage et rocheuse…

Raconter sa vie comme un roman - Blog Marie Pouliquen  - Biographe Paris

Texte 4 – Le même texte, romancé, à la 3eme personne du singulier. Sur le thème de la rupture amoureuse, avec changement des prénoms et de certains détails, ainsi que l’emploi occasionnel du passé simple.

Enfin, pour aller plus loin encore dans la fiction et le style romancé, s’éloigner de soi subtilement : l’écriture à la troisième personne du singulier, l’emploi du passé simple et la modification de certains détails (prénom, origine et métier de mon amie par exemple) nous amènent à un texte encore différent.

Le cœur en miettes, les larmes affleurant chaque matin et chaque soir dans le métro, Lucie ne savait plus comment panser ses plaies encore à vif. Elle restait hantée par Sandro et par ces souvenirs qui, au lieu de se ternir – cela l’aurait bien arrangée – semblaient constamment ravivés par la traversée d’un quartier dans lequel ils avaient leurs habitudes, l’écoute d’une chanson à la radio ou le son d’une voix grave qui lui rappelait la sienne.

Le moyen de s’en défaire ? Attendre, bien sûr, que la douleur s’estompe. Mais Lucie n’était pas patiente et une deuxième option plus immédiate lui apparut assez vite : elle allait changer d’air.

– Et si on partait douze jours dans les îles grecques, toutes les deux, là, au printemps ?
– Hein ? Quoi ? Bonjour, déjà !

Bien qu’habituée aux propositions improvisées et intempestives de sa meilleure amie, Julia mettait toujours quelques secondes avant d’entrer dans son jeu.

– Non mais j’ai eu un flash, j’en ai marre de pleurnicher, je te le demande d’amie à amie, ma Ju, il faut que je parte. Mais pas toute seule ! Tu veux bien là, qu’on s’envole pour les vacances de Pâques ? S’il te plaît…
 »

Julia vivait seule à cette époque et travaillait comme professeur de piano au conservatoire. Cela la rendait dépendante des vacances scolaires et elle n’avait pas prévu grand-chose, rien qui ne puisse s’annuler en tout cas. Lucie savait pertinemment qu’elle dirait oui et ne fut pas déçue.

Aventureuse et débrouillarde, son amie bordelaise lui apparaissait comme la parfaite compagne de voyage pour entreprendre ce périple. Chaussures de rando maintes fois éprouvées, forme olympique, son sac à dos s’avérait en prime parfaitement optimisé, et dix fois moins lourd que celui de Lucie, composé à la va-vite la veille du départ.
C’est donc le cœur et le bagage encore trop lourds, mais pleine d’espoir qu’elle embarqua avec Julia un beau matin sur un ferry étonnamment vide, depuis le port du Pirée. Les deux jeunes femmes avaient pour seul programme une vague idée des différentes escales à venir et les indications d’un guide du Routard périmé depuis quelques années.

Pendant leur séjour dans trois premières îles enchanteresses, Siros, Sifnos et Milos, elles avaient eu le temps de s’enivrer d’Ouzo, d’arpenter cent ruelles aux maisons blanches et aux toits bleus, de s’émerveiller à la vision de poulpes séchant sur des cordes à linge, au-dessus de matous prenant des poses pour les quelques touristes de saison.
Quant à Lucie et à sa peine, l’une des choses qu’elle appréciait le plus au cœur de ces paysages idylliques, c’était l’absence de Sandro. Les quelques évocations de lui qui la traversaient à la nuit tombée disparaissaient comme par enchantement le lendemain matin, puisque les deux amies se levaient suffisamment tôt pour admirer les levers de soleil sur le bleu immense.
Lucie se sentait donc presque guérie de lui lorsqu’elles débarquèrent sur Folégrandos, une petite île des Cyclades sauvage et rocheuse…

>>> Voici comment, à partir de deux phrases d’un souvenir, l’on peut graduellement s’aventurer vers l’autofiction ou la biographie romancée.


Suivant le niveau de fiction souhaité, je prête ma plume à celles ou ceux qui le souhaitent pour faire de leur histoire de vie un récit du réel nourri (texte 2) ou avec une part de fiction (texte 3), à la troisième personne et anonyme (texte 4).

Intéressé(e) ? Contactez-moi pour discuter de votre projet !

>>> Et maintenant pour les curieux, voici la véritable anecdote 😉 , bien réelle celle-ci, écrite de façon simple, en mode 1, pour aller plus vite :

Il y a quelques années de cela, j’étais partie en vacances avec mon amie Anne dans les îles grecques. Nous avions débarqué à Folégrandos, une île des Cyclades très belle mais assez sauvage et rocheuse.
Sur la carte de notre guide, nous avions déniché une petite crique qui nous permettrait de nous baigner dans l’eau bleue scintillante, mais en cette période de l’année, un seul bus permettait de s’y rendre.
Il traversait l’île une seule fois le matin. Et il repassait dans l’autre sens une seule fois en fin d’après-midi.

Motivées malgré tout, nous sommes parvenues à monter dans ce bus local aux horaires fluctuants. Sur nos indications, son chauffeur nous a déposées au centre de l’île, sur la ligne de crête qu’il allait nous falloir descendre pour trouver la plage. Mais en commençant cette descente assez abrupte, j’ai buté contre une pierre et, telle le capitaine Haddock dans Tintin au Tibet, j’ai commencé à dévaler la pente rocailleuse sans plus pouvoir m’arrêter.

A pic, cette pente s’avérait presque verticale, et je n’avais d’autre choix que de courir. Mon sac à dos bien rempli pesait sur mes épaules et me faisait accélérer dangereusement, au point de devoir prendre la décision de me jeter au sol pour éviter le pire, l’accident grave.

Je suis tombée violemment face contre terre et cailloux. Ecrasée sous le poids de mon sac à dos, je ne pouvais plus respirer et j’ai perdu connaissance.
Mon amie Anne s’est précipitée à mon secours, me demandant de sa voix claire : “ça va, Marie ?”. Incapable de me relever, j’ai réussi à ouvrir les yeux et commencé à lui tenir des propos délirants, je ne voyais plus rien, le noir complet. Ma tête avait heurté le sol et je m’imaginais mourir là, sur cette île, sous le soleil brûlant, au milieu de nulle part, d’un traumatisme crânien. La situation semblait d’autant plus dramatique que le seul bus de l’île ne repasserait qu’une seule fois, bien plus tard, et qu’il n’y avait aucun moyen de joindre quiconque sur cette île reculée.
Pourtant nous avons eu cette chance incroyable, l’un de ces heureux hasards que la vie réserve parfois aux âmes en détresse.
Une voiture de police, « LA » voiture de police de l’île qui patrouillait juste à ce moment-là, m’avait vue dégringoler depuis un autre pan de la montagne.
Lorsqu’elle est apparue, sortie d’un virage comme par magie, elle s’est arrêtée sans même qu’Anne ait besoin de lui faire signe.
Les policiers m’ont embarquée et allongée sur la banquette arrière. J’étais encore dans cet état de semi-inconscience et de délire. Ils m’ont amenée jusqu’à un endroit particulier, chez le seul médecin de l’île, qui m’a allongée sur un lit médical au centre d’une pièce.
L’endroit dans lequel il recevait ses patients était une simple maison ouverte à tous vents, et les villageois ont commencé à venir fureter et s’agglutiner tout autour des ouvertures de la bâtisse pour m’observer depuis l’extérieur. De vacancière anonyme et mal équipée, j’étais devenue l’attraction de la journée à Folégandros, le sujet de conversation qui animerait les repas du soir, la touriste bêtement accidentée dans l’endroit le plus pentu et hostile de l’île.
Heureusement, après une auscultation en anglais approximatif et un temps de repos, ma panique intérieure a finalement fait place au soulagement. Mon état s’est rapidement amélioré et j’ai pu reprendre peu à peu mes esprits. Nous avons regagné notre chambre d’hôte sans crainte pour ma santé.
Anne me racontera plus tard que j’ai dormi… pendant plus de vingt-quatre heures d’affilée. A mon réveil, une journée entière avait passé pendant laquelle elle m’avait littéralement « veillée ».
Cette histoire fait partie de ces petites aventures qui ont contribué à sceller notre amitié… à jamais.

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